jeudi 29 janvier 2009

Civils et militaires regardent la Planète !

Aujourd’hui, douze villages du Darfour vivent dans la crainte d’une attaque des forces soudanaises ; mais depuis quelques mois ils se sentent un peu plus sûrs d’eux grâce à Amnesty international qui a créé un site Internet spécialisé eyesondarfur.org qui diffuse en permanence des images satellitaires des villages menacés. Dans l’Amazonie brésilienne des Indiens luttent contre la déforestation sauvage avec l’aide des équipes de Google earth, voir mon post précédent. Ce sont les satellites commerciaux et leurs diffuseurs qui ont changé la donne.Il y a aujourd’hui 31 pays qui produisent et vendent des images satellitaires, mais deux entreprises américaines tiennent la grande part du marché. La société Geoye dispose depuis septembre 2008 d’un satellite très performant, Geoye I, qui permet de distinguer des objets de 40 cm au sol. Le Pentagone et son agence, le NGA, s’est réservé jusqu’à janvier le service exclusif des images de satellite grâce à un investissement de 237 millions de $ dans le programme de 500 millions de $. Puis c’est Google earth qui bénéficiera d’une exclusivité commerciale des prises de vue de Geoye mais le Pentagone s’est assuré que les images seraient artificiellement dégradées à une définition de 50 cm. Une interdiction relativement absurde puisqu’elle ne concerne pas les photos prises par un avion !
Google annonce aujourd’hui qu’il y a 400 millions d’utilisateurs du service « Google earth ». Le chiffre est peu être un peu gonflé puisqu’un seul utilisateur est compté pour 4 s’il a téléchargé les 4 versions successives du service. Il n’en reste pas moins que la popularité de Google earth est universelle et que, chaque jour, de nouvelles utilisations voient le jour. Mais, quelles sont les images que propose Google earth ? Il faut d’abord comprendre qu’il s’agit d’un patchwork d’images de multiples sources à des échelles très différentes. L’apparence d’unité est donnée par le service alors qu’on peut, en Ile de France, disposer de photos prises par avion avec une définition de 10cm et un peu plus loin d’images d’une définition de 70cm produites par le satellite Ikonos de Geoye lancé il y a 4 ans. Bien entendu les grandes villes et toute la côte d’Azur ont été rapidement proposées avec une très haute définition grâce à des campagnes de photographies aériennes faites l’année dernière. Avec Google earth on dispose d’un patchwork d’images avec une définition allant de 50 cm à 7 mètres. Le facteur temps est important, les images proposées par Google earth sont pour la plupart vieilles de deux à cinq ans. Pour disposer de prises de vues plus récentes, il faut acheter directement des documents aux producteurs d’images.
Autre restriction, Google a dû se plier à la volonté des gouvernements qui lui ont demandé de brouiller les images de zones stratégiques du type stations d’écoute ou bases de missiles. L’inconvénient du procédé, c’est que l’identification d’une zone brouillée avertit de la présence d’une zone dite « sensible ». Et, comme toujours sur Internet, il s’est trouvé un petit malin pour établir un
catalogue des secteurs camouflés. Afin d’éviter d’être accusé de faciliter le travail des ennemis des Etats Unis, Google a mis en place un bureau de liaison avec le Pentagone qui discute, au cas pas cas, la diffusion d’images sur des champs de bataille comme l’Irak et l’Afghanistan. Pour ne pas donner une vue exacte d’une installation militaire américaine, des prises de vue anciennes sont utilisées. L’extension de Google earth à l’ensemble de la planète a contrarié plus d’un état sur la planète. Les Chinois n’ont pas apprécié qu’on identifie leurs « camps de travail », le sultan du Bahreïn s’est indigné que ses résidences soient ainsi publiées et que ses sujets comptent le nombre de ses piscines. Certains pays luttent activement contre la diffusion d’images satellitaires. Le bureau chinois des cartes (SBSM) a annoncé qu’il allait fermer 10 000 sites chinois utilisant des cartes non homologuées. Un auteur militaire chinois, Qui Mingming, a rédigé un article sur l’importance de mesures spéciales contre l’indiscrétion des satellites. Il pronostique le camouflage et suggère d’utiliser les délais entre le passage d’un satellite pour réaliser des opérations militaires. Le brouillage des signaux de télémétrie entre le satellite et sa base est également envisagé. Et la Chine envisage de créer son propre système avec « image China » lancé en 2009 tout comme la Thaïlande (Digital Thaïland) et l’Inde.L’idéal pour ces états autoritaires serait que Google earth soit interdit sur leur territoire. Récemment le gouvernement indien a réclamé cette mesure après l’attaque terroriste de Bombay. Un complice des attaquants avait opportunément confessé que ses commanditaires avaient utilisé des photos de Google earth pour l’entraîner. Une cour de New Dehli a rejeté cette demande.
Les images satellitaires servent également aux « good guys ». C’est grâce à une image du satellite Ikonos de Geoye que, début novembre 2008, l’armateur saoudien d’un pétrolier a retrouvé son navire déclaré disparu par l’US Navy. Le Sirius Star était à l’arrêt, à 5 km de la côte somalienne, retenu en otage par des pirates. Des négociations se sont engagées, les pirates exigeant 30 millions de $ pour s’arrêter à 10 millions de $ au Nouvel An. Le navire valant 100 millions de $, l’armateur, Vela International, s’est résolu le 9 janvier à verser 3 millions de $ aux forbans qui ont laissé le pétrolier repartir.
La rançon a été parachutée par un petit avion sur le pont du cargo où les pirates se sont partagé le contenu du container. Les vingt-sept hommes ont ensuite filé dans cinq vedettes rapides en espérant rejoindre la côte sans se faire intercepter par le navire de guerre américain qui surveillait la zone. Dispute entre les pirates ou accident une des vedettes a coulé et les pirates ont récupéré le corps de Farah avec 150 000 dollars sous plastique dans ses vêtements. Il s’agit pour eux maintenant de retrouver leurs quatre autres camarades noyés et les 350 000 dollars manquants. Quand ils auront fini cette mission ils pourront reprendre leurs petites activités.

mardi 20 janvier 2009

Satellites d’observation, le nouvel eldorado.

La qualité et l’omniprésence des satellites civils d’observation pourraient laisser croire que les militaires se contentent aujourd’hui d’être clients des programmes civils. C’est mal connaître le complexe militaro-industriel qui tient par-dessus tout à conserver ses propres activités totalement secrètes et parfois très inefficaces ou, au mieux, d’un rapport qualité/prix déplorable. C’est le NRO qui gère les programmes satellitaires d’espionnage. Les engins envoyés ne sont pas annoncés, leurs noms sont secrets et ils ne sont pas référencés dans les banques de données de satellites. Leurs performances sont des secrets bien gardés, protégés par des dispositifs spéciaux (SCI) réservés aux informations plus secrètes que le Top Secret. Plusieurs experts estiment qu’ils peuvent voir des objets d’une taille de 10 cm, à la limite de l’effet de diffraction dans l’atmosphère. Malgré tout, le Pentagone continue à acheter des images aux sociétés commerciales qui ont une grande réactivité, en effet Google annonce pouvoir survoler n’importe quel point de la planète dans un délai de trois jours. De plus les images diffusées sont en couleurs.L’interaction entre activités militaires et activités civiles n’a pas été sans conséquences. La qualité des services apportés par le secteur civil a amené les militaires à regarder d’un œil critique les programmes secrets qu’ils finançaient. En 2005, c’est Boeing qui a connu l’annulation brutale d’un programme secret pompeusement appelé « Future Imagery Architecture ». La sanction est intervenue après une dépense de 10 milliards de $ et cinq ans d’efforts infructueux. Cette année, Obama a fait le choix de nommer un administratif très au fait des gestions de budget pour diriger la CIA. Faut-il pour autant croire que Leon Panetta va réduire encore les investissements du renseignement technique et faire des coupes dans les budgets des « black operations » ? C’est probable, tout comme le transfert de projets vers des sous traitants civils. Le conseiller d’Obama en matière de sécurité, John Brennan, ancien chef d’état major de la CIA a ensuite dirigé une firme privée de sécurité, Analysis Corp. Les entreprises privées ne manquent pas pour reprendre des activités réservées jusque là aux militaires. Outre Google, les Etats Unis ont également donné naissance à une autre grande entreprise, Digital Globe qui dispose de deux satellites performants. Marchés militaires et civils garantissent la pluralité des acteurs dans un secteur qui connaît une croissance constante.Pour donner une idée des sommes en jeu, prenons l’exemple du Soudan. L’ONU est intervenue pour imposer un cessez le feu entre ce pays et ses voisins, chacun se plaignant d’incursions frontalières. Pour fixer une bonne fois pour toutes les frontières du Soudan, l’ONU a commandé pour 600.000 $ d’imagerie satellitaire. Le tracé de la frontière, tracé sur écran, sera ensuite matérialisé au sol. Nous verrons, dans le prochain post comment ce nouveau marché évolue.

lundi 12 janvier 2009

Images par satellite, une planète transparente.

L’année dernière, un chercheur de la Fédération of American Scientist (FAS) a découvert sur Google Earth une scène rare. Alors qu’il recherchait des informations sur les bases militaires chinoises, il identifie le dernier modèle de sous-marins chinois Jin, équipé de missiles intercontinentaux. Le submersible était à proximité de sa base située au sud du port de Dalian. Pouvoir ainsi observer ce type d’événements montre qu’aujourd’hui la géopolitique est bouleversée.
Sites stratégiques et bases militaires de tous les pays sont maintenant constamment sous les objectifs des satellites civils dont les images sont disponibles grâce à Google et à Microsoft (Virtual Earth). Qu’il s’agisse d’une offensive militaire, de frappes aériennes ou de simples destructions, chaque événement est identifiable avant même que propagandes et désinformations ne brouillent les pistes. Les conséquences de cette transparence généralisée n’ont pas encore totalement été mesurées.
La révolution qui s’accomplit sous nos yeux est née en 1958 dans le cadre d’un programme militaire américain : le gouvernement a lancé un programme secret de satellites espions afin d’avoir des informations précises sur les programmes militaires soviétiques sans risque de se faire descendre ses avions espions U2. Les satellites américains Corona survolaient le territoire ennemi et leurs films étaient parachutés dans des zones amies où ils étaient récupérés par avion ou à terre. Ils ont ainsi fourni des images aujourd’hui déclassifiées d’une résolution au sol de 8 mètres, ce qui signifie qu’il fallait que les objets au sol aient au moins cette dimension pour être clairement visibles. Les photos étaient suffisamment bonnes pour donner une idée claire de l’étendue des forces militaires soviétiques. La génération suivante de satellites espions permit une définition inférieure à un mètre et diffusait directement les images prises.
La révolution est venue du secteur civil avec les images du
satellite français Spot qui, bien que n’ayant qu’une définition de 10 mètres, a permis d’ouvrir un considérable marché d’utilisateurs civils. Quand la définition est descendue à 5 mètres pour les images vendues par Spot mais aussi pour celles vendues par des sociétés russes qui rentabilisaient ainsi leurs programmes militaires, tout a changé. Lors de la première guerre du Golfe, un journaliste d’ABC découvrit grâce à des photos satellites russes, que le gouvernement américain mentait en annonçant que 250 000 soldats irakiens avaient envahi le Koweït. Ils étaient en fait trois fois moins nombreux. Cette transparence généralisée n’a fait depuis que s’accentuer. L’année dernière, un habitant de l’état de Washington à la recherche d’une maison a fait, grâce à Virtual Earth de Microsoft, une découverte incroyable. En passant au-dessus de la base de l’US Navy de Kitsap-Bangor, il a clairement distingué un sous-marin nucléaire au repos. Et ce qui l’a le plus étonné, connaissant un peu les sous-marins, c’est qu’on distinguait parfaitement son système de propulsion nucléaire. Or, cette pièce est la plus secrète pour un sous-marin de ce type, sa forme et sa taille donnent des indications précieuses sur les moyens utilisés pour assurer la discrétion de ses déplacements (bruits, bulles d’air). Quand ils sont en réparation les sous-marins sont donc toujours protégés par des hangars ou, au pire par des bâches. La photographie, mise sur le blog de l’internaute, a fait le tour de la planète au grand désespoir du Pentagone.
Le plus paradoxal de cette situation, c’est qu’elle est la conséquence des efforts faits par les militaires américains. En effet, c’est en 2003 que la
National Geospatial Intelligence Agency, service spécialisé de traitement géographique du champ de bataille, s’est intéressé aux activités d’une entreprise nommé Keyhole qui avait réussi à intégrer dans un même système de représentation, des images satellitaires et des images prises par avion. Grâce à une importante commande du Pentagone, Keyhole put mettre au point un service universel et performant, consultable sur Internet après le téléchargement d’un logiciel spécialisé. Le génie de Google fut de comprendre le potentiel de ce service, s’il était offert gratuitement aux internautes. La société fut rachetée et devint Google Earth, un des plus grands succès du monde de l’Internet. Le prochain post expliquera les raisons de ce succès.

lundi 5 janvier 2009

Dans 20 minutes vous serez bombardés !

Les habitants de Gaza, bombardés depuis une semaine par l’aviation israélienne ont eu la surprise de recevoir des coups de téléphone chez eux ou sur leurs portables leur annonçant que, vue la proximité de leur maison avec des implantations du parti Hamas, ils devaient quitter leurs lieux qui allaient être détruits par des missiles. L’information, rapportée par le Times de Londres, montre que l’armée israélienne est montée d’un cran dans sa guerre psychologique contre le Hamas. Les appels sèment la panique dans la population qui ne sait pas où se réfugier, la plupart de ceux qui reçoivent les appels n’osent pas en faire part à leurs voisins de peur de passer pour des collaborateurs d’Israél et d’être liquidés par les services de sécurité du Hamas. Le chaos ainsi créé est censé affaiblir le Hamas, le couper de la population civile.
Pour réaliser ce but, les Israéliens utilisent des robots d’appel du type de ceux utilisés dans le télémarketing qui envoient des messages en arabe préenregistrés. C’est le dernier épisode
des opérations « psyop » qu’utilise avec beaucoup d’efficacité l’armée israélienne. Un article fait le bilan impressionnant de toute la gamme des opérations qui ont été menées pendant la dernière guerre du Liban :parachutages de tracts, interventions pirates sur les radios et les télévisions libanaises, guerre électronique sur Internet.

Pour savoir de vive voix comment les Palestiniens de Gaza vivent cette situation, vous pouvez leur téléphoner en faisant l’indicatif 00970 l’indicatif 8 trois chiffres qui sont 213 ou 205 ou 206 en ajoutant 4 chiffres au hasard.